Page 94 - L’AÉROPOSTALE D’AMÉRIQUE DU SUD
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Récit.
Le 15 mai 1933, Jean Mermoz décolle enfin, pour Dakar.
Incident de fuite d'eau au moteur gauche impossible à réparer.
On compense avec tous les liquides disponibles : café, champagne...
Urine !
La température s'élève : eau, huile 90°, température 36-38°.
Mermoz coupe le moteur gauche et ralentit le droit pour équilibrer.
Mais l'Arc-en-Ciel termine sa route, premier avion à faire l'aller-retour
par ses propres moyens et se pose à Dakar de nuit, sur un terrain court à
peine balisé par des chiffons d'essence et deux moteurs seulement.
Nouveaux télégrammes de félicitations.
http://cafcom.free.fr/couzi/couzi2.html
[Paul Bringuier décrit ainsi l'arrivée à Dakar.
: http://www.comptoir-aviation.com/le_comptoir_de_laviation/1_la_boutique
« Après dix-sept heures, trente minutes, les trois moteurs s'arrêtent de
hurler. Nous restons quelques secondes immobiles à écouter s'apaiser en
nous les derniers remous du grand tumulte.
Une marée puissante gonflée de clameurs bat maintenant à l'extérieur des
flancs en bois de l'Arc-en- Ciel. J'ouvre la porte.
Pendant quatre heures sur le terrain, grâce à la radio, Dakar avait suivi
notre lutte, avait l'impression qu'il y participait. "Ils se défendent ... Ils
perdent de la hauteur... ils tiennent toujours."
Et cette foule soumise à une telle épreuve nerveuse, passionnée, avait vu
tout à coup apparaître, dans l’ombre, les grandes ailes blanches de l’Arc-
en-Ciel.
Son émotion creva en folle ruée, en gestes désordonnés, en larmes.
Ces gens pour qui nous étions des inconnus avaient à cette minute le
sentiment que nous étions leurs fils, qu'ils nous avaient toujours connus,
toujours aimés.
À mesure que nous sautions de la carlingue, comme des plongeurs dans
une eau, un remous écrasant emportait chacun de nous.