Page 166 - L’AÉROPOSTALE D’AMÉRIQUE DU SUD
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Le 22 janvier 1931, nous étions au cœur de l'été brésilien. À cette
époque, le ciel d'un bleu très doux reste pour la plus grande partie de la
journée et il semble que cette quiétude aille se prolonger, mais,
régulièrement, lorsque arrivent les cinq heures de l'après-midi des nuages
venus de nulle part, ne surgissent brusquement, obscurcissent le soleil qui
cependant les transperce encore. Les rayons lumineux virent au violet, à
l'orange, au rouge et le ventre de l'orage est d'encre alors que le bleu azuré
domine encore à l'horizon. Puis cet orage éclate, violent, torrentiel, local
aussi.
Tous les pilotes redoutaient des régions comme la pointe du cap San
Thomé de quelque cent cinquante kilomètres au nord de Rio ;
immanquablement lorsqu'ils arrivaient à la nuit tombée en ces lieux, l'orage
leur barrait la route. Pour cette raison, près de la petite cité de Campos,
nous avions aménagé un terrain de secours gardé par un indigène dont la
tâche consistait à s'assurer qu'aucun obstacle, de bestiaux ou termitière,
ne risquait de compromettre l'atterrissage des appareils en difficulté.
À Rio, depuis deux jours, le ciel était d'une limpidité extraordinaire, la mer
apaisée à l'extérieur de la baie était plate comme un miroir et la visibilité
était tel que l'on pouvait distinguer le relief de toutes les îles couvertes de
végétation sombre.
Sur le pourtour de la baie de Botafogo, au pied du Pain de Sucre, une
foule joyeuse parée de couleurs claires s'était rassemblée pour attendre
l'arrivée annoncée depuis quelques jours de la croisière du maréchal Italo
Balbo. En effet, le raid des hydravions italiens Savoïa devait s'achever au
centre même de Rio.
http://www.maillet.tv/2012/baie-de-botafogo/
Cette escadre composée de quatorze appareils avait quitté Orbetello, le 17
décembre 1930 ; onze de ces hydravions devaient arriver au but et être
par la suite achetés par l'aviation navale brésilienne.