Page 189 - L’AÉROPOSTALE D’AMÉRIQUE DU SUD
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Vous devez comprendre : la plage en pente, le plus gros poids portant
sur cette roue, un cheval de bois et plus assez de vitesse pour avoir une
action quelle conque sur les gouvernes.
J'eus à peine le temps de sauter de la carlingue, j'espérais qu'en me
précipitant sur la queue, je ferais tourner l’appareil, mais déjà l'eau
m'arrivait au-dessus des genoux et je n'avais plus aucune force pour agir
efficacement. - Et Dorseto, votre radio ?
- Le sommet de son casque émergeait à peine de la carlingue ; il n'avait
encore rien vu.
Quand je lui avais fait signe que nous allions atterrir, il communiquait
encore et il n'avait pas eu le temps de remonter l'antenne auparavant. Tête
baissée, il s'acharnait sur le rouet de plus en plus résistant puisque le long
fil traînait déjà sur le sable. Alors ?
- Eh bien, à mes cris, il leva la tête, ses binocles lui tombèrent du nez
et il s'élança si maladroitement qu'il tomba dans l'eau la tête, la première.
Si nous ne l'avions repêché, il y serait sans doute encore, empêtré dans
sa grosse combinaison fourrée.
Il ressemblait à un cocasse Bibendum, fit Janet en riant.
Couret, Néri et ceux qui les entouraient avaient assisté à l'accident sans
pouvoir intervenir, ils s'étaient précipités pour retenir l'appareil.
Tous s'étaient mis à l'eau, civils ou soldats et leurs efforts avaient pu
ramener le monoplan sur la plage ; en dehors des binocles, du chapeau de
paille et d'un soulier de Dorseto, rien n'avait été perdu.
L'échange des moteurs, le manchonnage des tubes cassés demanda
quatre jours au bout desquels les deux équipages s'envolèrent en se
tournant le dos.
Ainsi, se terminent mes cent soixante et onzièmes dépannages.
Ce terrain si chèrement gagné, nous étions en train de le perdre !
La révolution de Sao Paulo venait de voir la victoire des troupes
gouvernementales.