Page 201 - L’AÉROPOSTALE D’AMÉRIQUE DU SUD
P. 201

201


                     Pour un d'essai, qu'il ne cherchait pas, Chagas se révèle, car la tornade
                  est loin de l'épargner, et sur son émetteur comme à la canne d'antenne, «
                  l’humidité »    l'environne  d'étincelles  inattendues.  Il  apporte  néanmoins
                  l'aide la plus précieuse à Vanier et à travers les épais rideaux des parasites
                  atmosphériques, il réussit à capter quelques messages de Rio.


                  De  Rio,  où  Marcel  Reine  attend  pour  prendre  le  relais  en  direction  de
                  Buenos-Aires.  En  urgence,  Reine  fait  dire  à  Vanier  qu'il  pense  l'arrivée
                  impossible, car dans la pluie torrentielle et la visibilité pratiquement nulle,
                  les orages embrasent tout le secteur. Venant de Reine, une telle indication
                  pèse un poids exceptionnel.

                  Mais Vanier est à 100 km de Rio. Il n'a plus l'autonomie pour retourner à
                  Victoria.  Et  d'ailleurs,  il  n'y  songe  pas.  Il  faut  qu'il  arrive,  ou  bien...,  ou
                  bien..., comme il l'a dit lui-même. Il sait qu'au redouté Cap Frio, les repères
                  sont coupés, et qu'avec un compas bien difficile à lire, il devra faire un
                  brusque changement de cap de 90 degrés sur la droite, pour retrouver la
                  côte.


                   Dans  la  bourrasque,  où  semblent  s'être  donné  rendez-vous  toutes  les
                  cataractes du monde, l'appareil est violemment chahuté, et Chagas perd
                  son antenne. Dans les remous, par crainte d'être éjecté, il se cramponne
                  aux longerons. Mais le merveilleux moteur 450 chevaux Renault tournent
                  rond, et son chant d'orgue coule dans le tonnerre de la tempête. C'est aussi
                  pourquoi Vanier arrivera.


                  Vanier  trouvera  Rio.  Parmi  des  alternances  de
                  déluges, il passera à travers les chicanes des pics
                  et massifs dispersés sur cette région tourmentée. Et
                  lorsque peu après le milieu de la nuit locale, à l'issue
                  de  16  h  40  de  vol  ininterrompu  depuis  Natal,  il
                  posera  le  Laté-26  dans  la  boue  du  Campo  Dos
                  Affonsos, il aura accompli une dernière étape de 04
                  h 30 depuis Victoria.


                  Après coup Vanier lui-même a dit sur cette étape de
                  Victoria à Rio : avec la connaissance d'un tel temps,
                  de nuit, responsable de La Ligne, j'aurais, du sol,
                  donné  l'ordre  au  pilote  de  faire  demi-tour  ou  de
                  rester à Victoria.

                                                                          Raymond Vanier (1895-1963) http://www.passion-
                                                                          33.fr/page200.html
   196   197   198   199   200   201   202   203   204   205   206